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Inventaire après décès chez un luthier

10 juin 2017

“Les inventaires après décès constituent une sorte de photographie d’un lieu de travail avec ses différentes richesses”

Cette phrase extraite du livre de Joël Dugot, nous montre toute l’importance de ces documents dans l’étude des conditions de vie de nos ancêtres.

Je n’ai pas eu l’occasion d’approfondir mes recherches en me rendant aux Archives départementales des Vosges. Je ne peux donc vous parler des inventaires après décès de Charles Claudot, et consorts. Pour vous décrire quel pu être l’environnement des luthiers de ma généalogie, je vais m’appuyer sur l’étude menée par Jean-Paul Rothiot, Les inventaires après décès du XVIIIe siècle et leur exploitation.

 

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Les inventaires après décès (IAD) réalisés avant la Révolution sont conservés dans les actes du bailliage de Mirecourt. Au décès du chef de famille ou de son épouse, les scellés étaient apposés dans la maison. Quelques jours plus tard, les scellés sont levés et un inventaire est dressé en présence et avec l’assistance d’un luthier pour l’estimation des biens liés à l’activité du défunt, ainsi que d’une voisine pour l’estimation des biens ménagers.

 

Jean-Paul Rothiot a étudié les IAD de 43 luthiers. Il en ressort que la valeur globale des biens peut varier de 33 410 livres lorraines pour le luthier Nicolas Chappuy à zéro pour Louis Collin. 1 livre lorraine valait trois-quart de livre tournois, soit environ 0,96 €. Les biens de Nicolas Chappuy s’élevaient à environ 32 000 Euros.

 

L’habitat du luthier

34 luthiers sont propriétaires de leur maison, que ce soit par héritage ou acquisition. Les 8 luthiers restant ne sont pas propriétaires, et leur logement ne se compose que de trois pièces :  une cuisine, une chambre et une boutique.

Si tous les intérieurs des maisons comprenaient tables, chaises, lits et armoires, il pouvait s’ajouter, selon le niveau d’aisance un buffet, une horloge ou encore un miroir.

 

Du noir et blanc à la couleur

L’inventaire des vêtements est aussi très intéressant à étudier. Nous apprenons que les habits, vestes et culottes, étaient faits soit de drap, de velours, de serge, de toile ou encore de panne (tissu de brillance marbrée). Les couleurs des vêtements que pouvaient porter mes ancêtres ont attiré mon attention : bleu, vert pomme ou violet, associées à du noir ou du gris.

Les représentations en noir et blanc que je me faisais jusque là venaient de prendre vie en Technicolor.

 

Le luthier et la religion

L’étude des inventaires après décès fait apparaître que les objets de piété sont peu nombreux. Jean-Paul Rothiot pose deux hypothèses : des inventaires incomplets, ce qui me semble peu probable compte-tenu des détails des IAD étudiés, ou une possible déchristianisation des luthiers. Cette deuxième hypothèse n’est pas à mettre de côté. En effet, dans un entretien entre l’ethnologue Hélène Claudot-Haward et son père Pierre Claudot, il est précisé que “La corporation des luthiers rassemble historiquement des hommes qui s’affirment laïcs et républicains“. Bien que les inventaires étudiés datent d’avant la Révolution, se peut-il que nous assistions à la naissance de ce mouvement ?

 

Le luthier et l’argent

Nous l’avons vu, les richesses des luthiers pouvaient aller de tout à rien. L’étude de Jean-Paul Rothiot fait ressortir que, bien que les quelques luthiers les plus riches prêtaient de l’argent à d’autres luthiers, notamment pour soigner un malade, 21 luthiers sur les 43 sont assez lourdement endettés, souvent suite à l’achat d’une maison.

 

Et mes luthiers ?

En dehors d’archives les concernant, je ne peux rien affirmer. Toutefois je commence à avoir un meilleur aperçu de leurs conditions de vie. Probablement propriétaire, la famille Claudot devait avoir un petit pécule, et quelques meubles supplémentaires. Il ne me reste plus qu’à aller vérifier tout cela aux Archives départementales des Vosges.

 

 

Sources et bibliographie

Joël Dugot, La facture des instruments à cordes au temps de Jacques Dumesnil et Jean Desmoulins, une approche à travers leurs inventaires après décès, dans Florence Gétreau, Les luthiers et instrumentistes parisiens, XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Délégation à l’action artistique de la Ville de Paris, 1988, p. 35

Jean-Paul Rothiot, Les inventaires après décès du XVIIIe siècle et leur exploitation, dans Les Amis du Vieux Mirecourt-Regain & Musée de la Lutherie et de l’Archèterie françaises, Les sources de l’histoire de la lutherie, Mirecourt, p.143-162

Hélène Claudot-Hawad, La condition des luthiers de Mirecourt dans les années 1910 illustrée par l’histoire d’une familleLes Carnets de la phonothèque,, dans 2012

Eric Marchal de Salm, La Lorraine ne connaissait pas la monnaie unique, dans Lorraine 3 frontières généalogie, 2007

Conversion des monnaies d’avant la Révolution en valeur actuelle, dans Histoire P@ssion Saintonge Aunis Angoumois, 2006

 

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  1. Des vetements vert pomme ? Je me demande ce qu’on utilisait comme teinture. Ce n’est clairement pas une couleur à laquelle j’aurais pensé en dehors de la cour.
    La différence de richesse des luthiers m’a surpris, comme ce n’est pas une très grosse communauté, j’aurais pensé qu’elle était assez hompgène. En fait, on se fait plein d’idées fausses aussi longtemps qu’on ne regarde pas les choses dans le détail.
    Je croise les doigts pour que tu puisses prochainement aller faire des recherches aux archives des Vosges

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