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Théorie, une histoire familiale rêvée

23 novembre 2019

Pendant un mois, je partage avec vous mon journal : une année de généalogie. Entre contrats professionnels et recherche privée, découvrez les facettes de la généalogie. Aujourd’hui, je vais vous parler de théorie ou d’une histoire familiale rêvée.

Théorie, nom féminin (bas latin theoria, du grec theôria, observation) :

– Système d’hypothèses sous-tendant les interprétations des événements

– Connaissance purement spéculative

Larousse.fr

Que ceux et celles qui n’ont jamais élaboré de théorie pendant leurs recherches lèvent la main.

Que ceux et celles qui n’ont jamais entendu parler d’une histoire/légende familiale lèvent la main.

Nous avons tous, à un moment ou à un autre émis une théorie sur un double décès troublant, une disparition. De même que nous avons tous entendu un jour parler de cet ancêtre parti au combat alors qu’il n’avait plus qu’une jambe, un bras, était borgne mais avait une ouïe incroyable.

Dans mon histoire familiale, j’ai grandi avec cette idée que ma grand-mère n’aimait pas les Italiens car c’était de leur faute si mon grand-père a été tué en 1940. Il s’avère que les Italiens n’ont rien à voir dans l’histoire.

Il y a aussi ma mère qui me parlait toujours de cette grand-mère qui s’était pendue car sa fille était morte du croup (laryngite diphtérique, qui peut amener la mort par asphyxie). J’ai cherché sans trouver de preuves concluantes. Toutes ses grands-mères sont mortes à un âge vénérable, leurs filles adultes, mariées et mères de famille. Néanmoins, il faut que je pousse l’enquête sur ses arrières-grands-mères. Peut-être ne faisait-elle que répéter ce que sa mère lui disait ? Telle est ma théorie.

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Image par PIRO4D de Pixabay

Pourquoi élaborons-nous des théories ?

L’être humain a besoin de comprendre. Si la nature n’aime pas le vide, nous n’aimons pas ne pas savoir. Et quitte à savoir, autant partir sur des théories avantageuses.

C’est ce que je constate chez mes clients étrangers. Leur histoire familiale, liée à l’émigration, est souvent enveloppée d’un halo de grandeur.

Il y a cet ancêtre français qui, bien qu’il était, selon ses écrits, le valet d’un noble écossais, était en fait son fils. Me voilà donc partie à la recherche de Jean Bonhomme, né à Paris en 1761. Plutôt que de courir après un fantôme, j’ai concentré mon enquête sur le soi-disant père. Mes découvertes ont permis d’infirmer cette théorie. Non seulement, il n’était pas le fils, mais en plus, il était peu probable qu’il ait travaillé pour lui. Mon client se souvenait que son grand-père avait un jour détruit des papiers de famille et qu’il ne voulait pas en parler. La vérité s’y trouvait-elle ?

Il y a ce Français, émigré aux États-Unis, bien installé dans sa communauté, dont la nécrologie indique qu’il était le médecin de La Fayette, et qu’il l’a accompagné lors de son voyage en Amérique. Là encore, aucune preuve tangible. Ni dans les archives privées de La Fayette, ni dans les rôles des navires. Quant aux archives des académies de médecine, elles sont soit muettes, soit manquantes. Était-il un simple médecin et a-t-il enjolivé son arrivée sur le sol américain ? C’est possible.

Abdallah, C’est ça qui est la vérité, Flickr

Faire face à la vérité

Lorsque je suis contactée pour de telles recherches, mon premier réflexe est de préciser que le résultat des recherches risque soit d’être neutre par manque de preuves suffisantes, soit d’invalider la théorie transmise de génération en génération. Je veux que mes clients soient prêts à entendre la vérité. Qu’ils sachent qu’ils peuvent être déçus. Cela n’enlève en rien le mérite de leur ancêtre d’avoir émigré.

Nos recherches ont besoin de théorie pour avancer. Toutefois, il faut raison garder et ne pas interpréter les faits ou les sources pour qu’elles aillent dans le sens de nos désirs.

Nous devons avoir la même attitude qu’un historien. Nous devons rester neutres face aux sources. Nous devons les faire parler, mais pas les distordre.

Selon moi, la “gloire” ne vient pas d’un ancêtre prestigieux, la “gloire” vient d’un travail de recherche sincère et honnête.

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  1. les légendes familiales …. j’ai eu à faire à ça avec mon arrière grand mère orpheline de la guerre de 70, élevée par des soeurs allemandes en Lorraine et qui parlait français avec un fort accent allemand. En fait elle avait 20 ans en 1870. Installée en Algérie, tout accent était étranger ! “Une sainte” disait ma grand mère…. Une sainte ? non une femme libre qui a rencontré un homme plus jeune qu’elle qui lui a fait des enfants hors mariage. Qui plus est j’ai eu la surprise de voir que les naissances d’enfants hors mariage se sont étendus sur 2 générations (psychogénéalogie ?). Les légendes familiales ne tiennent plus devant les dates

  2. Rester droit dans ses bottes appuyés sur les sources… Facile à dire! Mais la personne en face s’est construite (au moins partiellement) sur ce qui est une légende! Il y a peu, sur une page Facebook locale, une personne a évoqué une relation ancillaire et interdite entre une arrière grand mère devenue veuve et le curé de la paroisse relation ayant abouti à un enfant devenu lui même curé et missionnaire et patati et patata. Bêtement, j’ai cherché le curé, trouvé son âge, ses dates de passage dans la commune, la date de naissance de son pseudo fils, et rien ne correspondait. Toujours aussi bêtement, j’ai exposé une théorie plus réaliste : l’enfant était certes naturel, il était doué pour les études, le curé employait sa mère comme bonne (du curé) et comme ce brave prêtre était d’une famille aisée, il avait financé les études du fils de sa bonne. Très logiquement, je me suis fait injurié : cela faisait quatre générations que l’histoire courait, la preuve qu’il s’agissait de la vérité vraie! Alors, j’ai pris l’engagement de ne plus m’intéresser aux légendes familiales des autres et de garder pour moi ce que je sais des miennes!

    1. Pierre,

      Je le précise bien dans l’article, il faut que la personne soit prête à entendre la vérité. Si vous avez recherché les actes et annoncé de but en blanc à cette femme, que ce qu’elle prend pour une vérité familiale n’est en fait qu’une mystification, ne soyez pas surpris de sa réponse !

      Sophie

  3. Et pour moi, un ancêtre venu du pays de Bray à la suite du duc d’Aumale pour s’installer en Moselle…sauf que l’ancêtre en question est plus probablement venu de Belgique….

  4. Etant plus jeune, j’ai entendu dire dans la famille maternelle que certains de nos ascendants étaient des immigrés polonais. J’ai eu beau remonter toutes les branches possibles, pas l’ombre d’un(e) polonais(e) !! La légende familiale initiée par une tante s’effondre…

  5. Eh oui ! Chez nous, la légende familiale rapportait qu’un de mes ancêtres côté maternel avait participé aux guerres napoléoniennes et que, durant la retraite de Russie, il avait prêté son manteau au maréchal Ney ! Il avait récupéré ensuite le manteau, sans doute, puisqu’il avait demandé à être enterré avec… le seul souci, c’est que personne dans mon arbre généalogique ne peut endosser ce fameux manteau : j’ai bien identifié deux militaires de carrière, mais l’un est né en 1821, trop tard donc pour participer aux guerres du Premier Empire, et l’autre, né en 1800, n’a entamé une carrière de chirurgien puis de médecin militaire qu’en 1823. Je serais curieuse de savoir comment cette légende s’est forgée dans la famille…

    1. Ne dit-on pas “il n’y a pas de fumée sans feu “? Mais il est qu’avec la meilleure volonté, il arrive que nous n’arrivions pas à comprendre le début de l’histoire. Toutefois, il ne faut pas oublier l’effet du téléphone arabe. Une histoire est dite à une personne qui la répète en changeant un élément etc. Et nous voici quatre générations plus tard, à nous demander ce que le maréchal Ney vient faire dans notre histoire familiale !

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